Veni, vidi vici

CASSIN

CASSIN il était une fois le sixième degré

Par Georges Livanos

Coll. Altitudes dirigée par Michel Schulman- Editions Arthaud - Paris 1983)

Cassin, Esposito et Tizzoni retour walker

Extrait : «La Walker ? Il sait qu'elle se trouve dans le massif du Mont-Blanc, massif où 'sa main n'a jamais mis le pied' (Alphonse Allais). Sa documentation se limite à une carte postale envoyée par son ami le journaliste Vittorio Varale. Un vague tracé indique l’éperon, au verso, Varale avait écrit : 'Voilà la paroi que tu devrais faire'. [Description du trajet, à pied avec le matériel, de Courmayeur jusqu'au refuge de Leschaux] au détour de 'l'éperon là-bas derrière', quelque chose émerge des cimes environnantes, avec cet air de hautaine inaccessibilité des grands personnages. Consultation de la carte postale : 'C'est ça'. [Magnifique description de l'ascension de la pointe Walker par la cordée Cassin-Esposito-Tizzoni] 6 août 1938 : une silhouette sombre surmonte la dernière corniche. Il est quinze heures, la neige tourbillonne, le vent hurle, Riccardo, Riccardissimo, Monsieur Walker, est au sommet. Les clameurs rugissantes de la tourmente sont les cuivres éclatants sa victoire. En ce mémorable 6 août, Cassin n'a pas simplement terminé la Walker - et sa simplicité atteint au grandiose -, il a arrêté le temps, le temps de l'alpinisme, avec une date capitale, comme Whymper et Croz, le 14 juillet 1865, au sommet du Cervin. Les gestes souverains d'une action magistrale ne s'effacent pas, ils restent impérissablement sculptés dans les espaces ».

par Georges LIVANOS (Ed. Arthaud, Paris. 1983).

(Revue " La Montagne et Alpinisme " - No 2, 1983)

Le Grec parle de Ricardo Cassin

Dès le début des années cinquante, plusieurs articles dans la revue du GHM., Alpinisme, avaient déjà fait remarquer au-delà des qualités d'alpiniste et du créateur d'itinéraires aussi originaux qu'audacieux, un talent certain pour l'écriture.

En 1958, c'est l'inoubliable Au-delà de la verticale, révélation d'un écrivain original dans la grisaille de la littérature de montagne et des récits d'alpinistes célèbres de l'après-guerre. Un de ces quelques rares ouvrages du genre qui mérite d'être conservé dans sa bibliothèque. Depuis, plusieurs textes publiés dans notre revue La Montagne et Alpinisme nous rappelaient de temps à autre la réussite d'un itinéraire nouveau ou les retrouvailles vingt ans après avec une certaine Su Alto.

Un quart de siècle après la fameuse autobiographie, voici un Cassin revu et corrigé par Georges Lïvanos " le Grec ". Ricardo Cassin, le grand Cassin est remarquablement cadré et expliqué dans cette biographie consacrée à l'un des grands hommes de la montagne, celui qui tient peut-être la plus grande place si l'on regarde ses réalisations et ses succès alpins.

Mais on s'apercevra bien vite que ce Cassin n'est qu'un prétexte. Dès le début et à chaque instant, le propos déborde, on s'éloigne du grimpeur de Lecco pour s'ouvrir sur l'histoire de l'alpinisme, on revient à l'argument pour mieux s'adresser aux grimpeurs d'aujourd'hui.

Une suite au premier livre de L'au-delà de la verticale, aussi heureuse, aussi pleine d'humour.. un régal pour les connaisseurs. Un Cassin qui commence dès 1492… à l'instant où... Christophe Colomb découvre l'Amérique et où un événement mineur devait avoir une importance démesurée pour un petit nombre d'êtres humains: l'invention de l'alpinisme, l'ascension du mont Aiguille par Antoine de Ville.

On déborde sur l'alpinisme moderne créé par Fiechtl et Dulfer pour constater que, depuis, un nouvel "alpinisme moderne " explose tous les dix ans, l'avant-garde et le rétro alternant inlassablement. C'est dire que l'on dépasse la simple biographie pour s'adresser à ceux qui, aujourd'hui, sont persuadés, eux aussi, avoir inventé ce que Paul Preuss prêchait déjà en 1909... justement l'année de la naissance de Cassin.

Dans ce livre très drôle et d'une grande fraicheur, où humour, talent sensibilité, pudeur, ironie, situations loufoques et aussi railleries se disputent la place, Livanos n'a pas son pareil pour décrire le style d'un grimpeur, dessiner un paysage, faire parler un dièdre ou un surplomb. On apprendra aussi, par exemple, à conjuguer le verbe lustrer, mais on se laissera également conduire "dans ce monde où au-delà de l'effort, de la performance existent de secrètes et mystérieuses splendeurs ". Des impressions que l'on ne trouve que là-haut en bonne compagnie, celle de Ricardo Cassin, "un homme qui ne revient pas en arrière une fois le but fixé, un homme qui tend à l'essentiel, pour qui l'entre-prise se confond avec le but ". A lire absolument.

Claude DECK

Cassin 90 ans

Dédicace de Ricardo Cassin à Georges Livanos sur son livre "Cinquant'anni di Alpinismo" (dall'Oglio, editore - 1977)

A mes très chers amis

Sonia et Georges Livanos,

cette modeste histoire d'un amoureux de la montagne,

avec le plus profond respect et

la plus vive cordialité. Lecco 3 juin 1978

Pressé par Michel Schulman de traduire en français le livre de Cassin, le Grec finalement décida d'écrire son propre livre et à Cassin qui lui demandait "Pourquoi veux-tu écrire un livre sur moi alors que je viens d'en écrire un ?", le Grec lui répondit "Parce que moi je pourrais dire des choses que toi, tu ne pourrais pas.". (source Sonia Livanos)

"Ces hommes-là, il faudrait rien moins qu'une tonne de briques pour les abattre, neuf cent cinquante kilos seraient insuffisants"

(Sir Francis Younghusband)